Une question ministérielle intéressante !

Mme Hélène Laporte a interrogé Mme la ministre de la transition énergétique sur les perspectives d’évolution du régime d’exploitation des barrages français. 

Dans un référé du 2 décembre 2022, la Cour des comptes avertissait le Gouvernement des difficultés que posait l’arrivée à échéance de nombreuses concessions hydroélectriques devant intervenir durant les années à venir dans une situation juridique compliquée par les exigences de mise en concurrence.

En effet, toutes les installations hydroélectriques de plus de 4,5 MW appartiennent au domaine public et sont exploitées sous le régime de la concession aménagé aux articles L. 521-1 et suivants du code de l’énergie et se répartissent entre trois concessionnaires historiques : EDF (70 % du parc hydroélectrique français), la Compagnie nationale du Rhône (25 %) et la Société hydroélectrique du Midi (3 %).

Ainsi, les acteurs français de l’hydroélectricité se partagent le parc suivant un critère géographique, les installations d’un même bassin versant étant interdépendantes pour leur installation. La mise sur un marché concurrentiel de chaque concession à son échéance au terme du délai prévu lors de la mise en service pose le problème de l’éventuelle rupture de cette cohérence potentiellement défavorable à une bonne exploitation du parc.

La Cour des comptes a de plus alerté sur l’absence d’évaluation des conséquences économiques du projet de semi-régie qui semble retenu par le Gouvernement. Dans ce contexte, elle souhaite être renseignée sur la stratégie gouvernementale pour assurer la pérennité et le bon fonctionnement du premier parc hydroélectrique de l’Union européenne, élément majeur, au côté du parc nucléaire, du mix électrique bas-carbone français.

Voici la réponse à la question ⇩

Le Gouvernement porte une grande attention à l’énergie hydroélectrique et à son développement.

Cette énergie renouvelable et pilotable est essentielle à l’atteinte de nos objectifs climatiques mais également à la sécurité d’approvisionnement des Français ainsi qu’à la bonne gestion de la ressource en eau.

Aujourd’hui, la France compte plus de 2600 installations hydroélectriques qui ont effectivement représenté près de 11% de la production électrique française en 2022.

La majorité de la puissance hydroélectrique installée est exploitée par Électricité de France, la Compagnie nationale du Rhône ou la Société hydroélectrique du Midi. Dans certaines vallées, comme la vallée de la Dordogne, plusieurs exploitants peuvent se succéder, entraînant une nécessaire coordination entre eux pour l’établissement de leurs programmes de production respectifs.

La Commission européenne a engagé des précontentieux vis-à-vis de la France portant notamment sur l’absence de renouvellement par mise en concurrence des concessions hydrauliques échues.

Cette situation est préjudiciable pour la réalisation d’investissements importants, comme ceux projetés dans la vallée de la Truyère.

La Cour des comptes a établi un rapport sur ce sujet le 6 février dernier.

En réponse à la Cour des Comptes, le Gouvernement a indiqué qu’il explorait plusieurs scénarios pour le renouvellement des concessions qui doivent satisfaire 5 objectifs clairs, dans la lignée des annonces réalisée par le Président de la République lors de son discours de Belfort du 10 février 2022 :

  • Relancer rapidement des projets de développement actuellement bloqués par le contentieux européen dont des projets de STEP
  • Garder la pleine maitrise de notre parc hydraulique que pourraient fragiliser des mises en concurrence
  • Favoriser les synergies dans les usages de l’eau
  • Faire en sorte que l’ensemble des bénéfices générés par l’exploitation des concessions bénéficie in fine à la collectivité
  • Disposer enfin de contrats souples avec des possibilités vastes pour adapter ces dernières aux évolutions et aux besoins.

Aucune décision n’a été prise à ce stade concernant le régime juridique permettant de répondre à ces objectifs et les discussions se poursuivent avec la Commission européenne, sur les plans juridique, industriel, environnemental et social. Quelle que soit la solution retenue, ces 5 objectifs seront poursuivis.

A plus court terme et dans l’attente de l’aboutissement des discussions en cours, la loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables, promulguée le 10 mars dernier, permet désormais de sécuriser et de donner de la visibilité pour la réalisation d’investissements importants au sein de concessions échues.